Eriaka's Chronicles - 8

Publié le par Eriaka

« Dis-moi Eriaka, serais-tu atteinte de cécité depuis trois semaines ? »

 

J’étais encore dans mon pieu à moitié endormie. Avoir comme vision au réveil la gueule du chef à vingt centimètres de vous, croyez-moi ça vous donne envie d’vous rendormir illico presto !

 

« Je vous demande pardon ? »

« Ah je vois tu es frappée de surdité en plus ! C’est peut-être une épidémie faut en avertir le toubib au plus vite ! » S’est écrié le Chef.

« Bah enfin patron qu’est-ce que je vous foutez dans ma tente au petit matin ? Ya un problème ? Bolgrot s’est montré ? » Ptin c’que c’était dur de soutenir une conversation à jeun !

« Bolgrot ? Noooon il est encore en train de téter le poison qui lui sert de lait !  »

« Hein ? Je l’ai fixé un moment il a fait de même en répétant « Hein ? » comme s’il se foutait de ma gueule.

«  J’comprends rien Chef... Bon si ya pas urgence vous m’excuserez je vais aller brancher ma perf de cawa. J’suis cassée ... »

« Mais bien sur un café ! Je t’accompagne ! »

« J’aime pas ca. » Ai-je murmuré.

 

Je connaissais le vieux, quand il se la jouait guilleret, ça voulait dire que l’orage allait pas tarder à tonner.

 

« J’aime pas ça » Ai-je répété.

« Allons calme toi, c’est pas tous les jours qu’on a l’occasion de siroter d’la caféine ensemble ! »

On n’avait pas fait trois mètres qu’il a commencé à cracher l’morceau.

 

« Vois-tu ce matin je me suis dis : Tiens ! Si j’allais rendre visite à Eriaka voir ce qu’elle devient ! Elle doit être SACREMENT occupée vu que depuis TROIS semaines les annales de la guilde font du SUR PLACE ! »

 

Et voilà ... Je savais qu’il y avait une nouille dans l’potage... Et au réveil en plus ! Le salaud ! J’allais trinquer...

 

« Ecoutez Chef... »

« Non, non ! Tu n’as pas à t’excuser, je comprends, tu es malade, je vais appeler le toubib sur le champ. »

« J’vais très bien. »

« Haaa, tu m’en vois soulagé. Alors je ne vois qu’une autre raison, les responsables du ravitaillement ont oublié de commander du papier et de l’encre, ne t’inquiète pas ils vont m’entendre. »

« Mais non patron, j’ai tout ce qu’il faut. »

« Vraiment ? Non parce que vois-tu je m’suis dit : Vu que c’est le SCRIBE de cette guilde, si elle ne fait pas son BOULOT c’est qu’il doit y avoir quelque chose de grave ! N’est-ce pas ? »

« Le truc c’est que je m’suis lancée dans l’élevage de dindes, histoire d’aider votre femme. Je m’suis dit, avec les jours sombres qui s’annoncent deux éleveurs c’est pas de trop dans la guilde. »

« Heu redis-moi quand j’ai annoncé que chacun pouvait changer ses attributions à loisir sans m’en avertir ? »

« Bah... Vous l’avez pas fait. »

 

Merde j’savais plus quoi dire. J’espérais que la vioc ramène ses fesses en vitesse pour me servir mon café.

 

«  Haaa tu me rassures ! J’ai cru un moment que la mémoire me jouait des tours ! »

 

Il s’est mis à rire, un rire qui sonnait faux et précédait le coup de grâce. Puis comme prévu, il a coupé net le son pour me balancer froidement : « T’as jusqu’à ce soir pour rattraper le retard. Que je te voie traîner près des enclos et c’est ton oraison funèbre qu’il te faudra rédiger. J’me suis bien fait comprendre ? »

« C’est on ne peut plus clair Chef. »

 

Sur cette entrefait Mamichup s’est amenée, un bonnet à fleurs enfoncé jusqu’aux oreilles, ceint d’un ruban rose, un masque d’argile vert qui faisait ressortir ses petits yeux porcins et ses lèvres fripées et une chemise de nuit imprimée de minuscules pious verts et bleus, trouée par endroit et qui était sans conteste beaucoup trop grande pour elle. J’ai du me retenir pour ne pas exploser de rire, le Chef aussi.

 

« Par tous les furoncles qui m’sortent du cul qu’est vous foutez ici ! A-t-elle gueulé. La cantine ouvre dans une heure, pas avant ! Alors virez vos tronches de là ! »

 

Erf, la situation allait dégénérer ... Ya des jours comme ça ou j’me dis qu’une retraite anticipée serait pas du luxe ... 

 

 « Ecoute-moi bien la vieille, m’asticote pas au réveil ! C’est moi le Chef dans ce camp et si je veux un café maintenant, tu me fais un café maintenant ! Bordel ! »

« Heu chef, j’suis pas sûre que ce soit la meilleure méthode avec la vioc »

« T’occupe pas de ça, cette fois ci j’vais pas abdiquer. Ca fait trop longtemps que cette face de rat n’en fait qu’a sa tête. »

« Ha ouè ? Vous voulez un café ? Pas problème, bougez pas ! »

 

Elle disparut derrière ses fourneaux.

 

« Heu chef, là c’est pas bon, c’est pas bon du tout même ! La dernière fois qu’elle a dit ça le gars à mis un mois à s’en remettre. Vous vous rappelez ? »

« T’inquiète elle osera pas. Timbrée mais pas suicidaire la vieille, crois moi. »

 

Une minute plus tard, elle a rappliqué avec un sac, une gourde et du bois.

 

« Voila patron, dit-elle en balançant son fourbi sur la table avec fracas. Ça c’est le café, là l’eau et je vous ai apporté du bois pour faire le feu et chauffer l’tout. Pas trouvé le sucre, m’est avis qu’yen a plus. Bon moi j’vous laisse, aujourd’hui j’prends des vacances. Vais m’faire bronzer sur une plage de la péninsule, parait qu’la chaleur c’est bon pour les hémorroïdes. Allez à demain. »

« Quoi ! Le vieux était au bord de l’apoplexie... Bordel reviens ici de suite ! Je t’interdis de franchir la porte ! »

Autant crier à un sourd qui vous tourne le dos.

 

« J’vous avais dit que c’était pas une bonne idée. »

 

J’aurais pas du dire ça, le Chef m’a fusillé du regard.

 

« Tout ça c’est d’ta faute ! Si t’avais pas foiré ton boulot ces trois dernières semaines on en serait pas là ! Alors écoute moi bien, tu vas assumer tes erreurs et remplacer la vieille pour la journée aux cantines. »

 

« Hein ! Hè j’suis pas cuistot moi ! Vous l’avez dit vous-même j’dois rattraper mon retard ! »

« J’en ai rien à foutre, c’est ton problème. Démerde toi pour que les gars aient de quoi grailler. Et estime toi heureuse, vu la bouillie que l’aut’ folle leur file tous les jours, t’es pas obligée de faire dans la qualité. » 

 

Voila comment je me suis retrouvée à vivre l’une des pires journées de ma vie...

Moi qui ai besoin de calme et de silence le matin, j’ai dû répondre aux mêmes questions que me posaient tous les gars lorsqu’ils me voyaient aux fourneaux :

« Qu’est-ce que tu fous là ? Elle est morte la vioc ? Elle a été virée ? T’es plus scribe ? Ya du sucre ? T’as pas plus fort comme café ? » etc ...

 

J’en pouvais plus... Le paroxysme de mon calvaire fut atteint avec l’arrivée d’Aurel ... le bras droit du Toubib. Ce type est capable de vous parler sans reprendre son souffle pendant une heure, dans un débit proche de la vitesse du son ! Et encore s’il ne faisait que parler mais lorsqu’il est en forme et c’était le cas ce matin, il chante ! Oui, oui. Oh pas des chansons paillardes comme on aime les brailler dans la guilde, non, des chansons sur la vie, l’amour, l’amitié ... Il m’a épuisée ... En plus j’ai rien compris à c’qu’il m’a dit, un mélange de paroles et de chansons sans queue ni tête....

 

Ouè c’est trop galère maintenant à obtenir les étoffes de meupette même en vente... vu que le ouassingue ne sort plus de son trou .. emporté par la foule qui vous traîne vous entraîne...t’as pas vu Kricket ? Si encore je pouvais tuer seul des nufeus ca m’aiderait pour ma cape mais... I feel good ! tululululu... I feel so good.... Au fait j’t’ai pas dit j’suis passé maître soigneur ! J’ai les éclairs ! Frère Jack, frère Jack, pioncez-vous ? Pioncez-vous ? T’as pas vu Kricket ? Me faut un cordonnier pour de nouvelles bottes, j’hallucine comme c’est facile de soigner maintenant, dès que t’es maître c’est plus facile ! Si un joooouuuur la vie t’arrache a mooooiiii, que tu meurs que tu sois loin de moiiiiii , peu m’impooooorte si tu m’aiiiimeeees... Bon j’ dois y aller à plus !!!

 

Ptin mais il carbure à quoi le saligaud ?!!!!


à suivre ...

Publié dans Chroniques

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